~ CONCLUSION ~


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Né d’une activité méconnue pour ne pas dire marginale, dans les années 80, le Jeu Vidéo s’est imposé en tant que secteur économique dès les années 1989-1990. L’intérêt que lui portent les fabricants d’ordinateurs, de consoles, les groupes d’édition et les câble-opérateurs, s’inscrit dans une stratégie globale visant à contrôler le marché des loisirs high-tech (télévision interactive, Jeux Vidéo, multimédia, câble) estimé à 3 000 milliards de dollars au début du deuxième millénaire. Naguère passe-temps de hobbystes, le Jeu Vidéo est devenu l’objet d’enjeux commerciaux considérables. Sega s’est associé avec l’américain Martin Marietta, une société travaillant pour l’armée (missiles, transmissions, simulations de vol…) afin de concevoir des simulateurs de loisir. Des accords ont été conclu avec la société W Industries, précurseur en matière de réalité virtuelle immersive. Evans & Sutherland, qui est le n°1 de l’imagerie de synthèse destinée aux applications militaires, à l’entraînement des astronautes de le NASA et des pilotes, met son savoir-faire au service de Namco.

La réduction drastique des budgets militaires qui a suivi la fin de la Guerre Froide a incité les sociétés dépendantes jusqu’alors des industries de guerre, à se rabattre sur le secteur civil, notamment l’aéronautique commerciale, qui connaît une crise sévère. Le loisir numérique interactif constitue pour ces sociétés fragilisées une alternative séduisante, qui les fait entrer de plein-pied dans l’un des rares secteurs qui affiche des taux de croissance élevés.

Une civilisation des loisirs numériques

Les multi-nationales du loisir numérique, des télécommunications et les chaînes de télévision (câble, satellite) préparent les spectacles de demain. Le spectateur n’ira pas au spectacle mais se rendra dans le spectacle, abolissant la barrière qui séparait traditionnellement le public de l’œuvre. L’homme ne contemplera pas pendant des décennies un moniteur informatique. Déjà, l’écran disparaît au profit du casque de réalité virtuelle, en attendant les spectacles totaux dans lesquels l’homme circulera librement, entravé par aucun périphérique, des capteurs analysant la position de chacun des visiteurs dans l’aire ludique, transmettant les données de chacun de leurs gestes, même les plus infimes à l’ordinateur qui fabriquera à loisir, sans intervention humaine, des mondes improbables peuplés d’êtres inimaginables.

Que rechercheront les explorateurs de ces espaces numériques, rêveurs éveillés assurés d’un retour instantané, preux chevalier combattant sans péril les dangers virtuels de contrées numériques ?
Le Jeu Vidéo prépare t-il une civilisation vouée au culte des apparences, mène t-il à un monde immatériel que les esprits les plus faibles seront tenter de considérer comme une alternative à un monde réel sans attraits ?
Pour Philippe Quéau, " Le virtuel nous oblige à ne plus nous reposer sur les apparences, sur nos perceptions. […] Le passage au virtuel, loin d’être une fuite hors du réel, peut au contraire nous préparer à mieux y revenir, après l’avoir en quelques sorte simulé à loisir ". Les médias n’ont pas manqué de comparer les mondes virtuels avec des paradis artificiels, d’y déceler les symptômes d’une schizophrénie qui frapperait l’homme écartelé entre le virtuel et le monde réel. John Barlow, théoricien de la réalité virtuelle, conteste tout apparentement entre les psychotropes et l’immersion virtuelle : " Ceux qui seraient tentés de croire que la réalité virtuelle est comparable à une prise d’acide n’ont jamais essayé ni l’un ni l’autre ", affirme-t-il. Ce procès du fictif contre le réel, de l’intrication de l’imaginaire et du vécu, fut en son temps celui du cinéma, qui effraya à tel point les spectateurs de l’Entrée d’un train en gare de la Ciotat des frères Lumière qu’ils refluèrent précipitamment vers le fond de la salle. Le virtuel et les Jeux Vidéo ne sont donc que les prémisses, et posent assurément des problèmes éthiques, philosophiques et sociaux.
Ils appellent une réflexion et non des procès d’intention.

Né avec Pong, le jeu vidéo n’a que 30 ans et comparé à la lente maturation des techniques cinématographiques, il progresse à un rythme effréné. Le spectacle numérique, les mondes virtuels, seront peut être les loisirs du troisième millénaire. A eux seuls, les Jeux Vidéo ont de l’avenir et sont appelés à devenir le dixième art.